Histoire du jeu en Espagne

l’histoire en marche

Le jeu d’Echecs que nous connaissons aujourd’hui a eu une gestation fort longue. On en a eu un aperçu avec l’article sur le roque « à l’Italienne » tel qu’il fut pratiqué jusqu’en 1880 par nos voisins transalpins.

La transformation des règles en Espagne fut aussi « particulière »

En 2015, un joueur parisien, Stéphane Laborde, a traduit le traité de Ruy Lopez de Segura, daté de 1561 ….. écrit en espagnol de la Renaissance.
C’est certainement le traité le plus important de l’époque ! On y trouve la première étude sur l’ouverture espagnole ( évidemment!), ouverture toujours d’actualité de nos jours.

Le « Libro de la invencion liberal y arte del juego del Axedrez » est donc bien plus abordable et on peut y découvrir des véritables « perles »

  • Ainsi le roque, sans nom à l’époque, pouvait prendre plusieurs formes.

Le principe de base étant que le roi pouvait bouger de deux cases (pour ne pas faciliter notre compréhension Lopez écrit toujours « trois »…… mais il compte la case de départ !) lors de son premier mouvement (mais uniquement lors du premier), cela en ligne droite, en diagonale ou comme un cavalier et, cerise sur le gâteau, par dessus les pièces! Puis il met en place un second principe qui est que l’on ne peut déplacer deux pièces simultanément dans le jeu d’Echecs … les raisons sont religieuses, morales…. donc incompréhensibles pour le quidam du XXIème siècle.

Il faut bien être conscient que Ruy Lopez avait voué sa vie à la religion catholique ; il était en effet prêtre et confesseur du roi d’Espagne Philippe II et ne pouvait pas accepter des règles qui auraient pu aller « contre la morale » de l’époque (sic !) pour appuyer son point de vue !

Dans son traité il indique cependant que de mouvement simultané des deux pièces existe en Italie *

  • En Espagne le roque se faisait donc en deux temps !

Par exemple :

Lors d’une partie, le camp blanc pouvait jouer
– une tour en f1 (si les cases f1 et g1 étaient vides), les noirs répondent par un coup et maintenant les blancs jouent leur Roi en g1! … voila donc un petit roque à la manière espagnole de la Renaissance.
– ou encore (si la case g2 pour le camp blanc était disponible) un premier coup de tour en f1, les noirs jouent, et maintenant leur Roi en g2 ! …..et voila !

Il présente avec enthousiasme la « prise en passant » (« tomar en la via », littéralement « prendre sur la voie ») dont il fait la promotion tout le long du livre, alors qu’elle n’est pas jouée du tout en Italie où l’on joue à « pasar batalla », c’est à dire à « passer , éviter la bataille ».  La encore il trouve que « cela ne se fait pas » !!

Mais pour être impartial son traité contient les ouvertures ou la prise en passant s’applique et les mêmes ou elle ne s’applique pas. …..surprenant !
Encore plus surprenante est cette règle stipulant qu’un joueur qui met un échec à son adversaire doit l’annoncer à haute voix, faute de quoi l’échec ne sera pas pris en compte ! (bigre) …et la partie continuera comme si de rien n’était ….le roi sous le feu !
Ruy López explique aussi une troisième fin de partie, disparue aujourd’hui, en plus du pat (partie nulle) et du mat (gain de l’un des deux camps). Il évoque la « liquidation » (« robado » dans son traité)

La Robado consiste à se faire prendre la dernière pièce : le roi adverse étant nu, la partie est arrêtée et on considère qu’il s’agit d’une demi-victoire ou une demi-défaite, ce qui induit le gain de la moitié des paris engagés sur la partie. ( et oui l’argent … déjà l’argent !)

Cette fin de partie inusitée aujourd’hui implique des finales particulières, où par exemple avec Roi et Dame contre Roi et pion, pour gagner la partie il ne faut pas prendre le pion, ce qui implique de le bloquer, de sorte que certaines positions de cette finale ne seraient pas gagnables aujourd’hui.

L’histoire en marche !!!

* et également en France d’après l’auteur Jean Louis Cazaux)

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