Bonne année 2022

Nous souhaitons une bonne santé et beaucoup de bonheur à tous pour 2022, beaucoup de progrès, beaucoup de victoires et pas seulement aux échecs. Merci de votre confiance.

Un petit conte de Noël nous a été envoyé. Anonymement, comme d’habitude. Peut-être est-ce le même auteur d’ailleurs. Nous avons trouvé ça gentil et nous le publions in extenso. Il n’est pas exempt de naïveté mais il est frais comme le lait, encore qu’assez mâtin. Les différents niveaux de lecture ne nous ont pas échappé mais ça parle échecs alors notre jugement en a été favorablement affecté.

Voici un conte de Noël pour le Nouvel An.

Un enfant, le petit François-Baptiste (nous l’appellerons ainsi), demande à son père :
– « Papa sais-tu ce que » (il s’exprime très bien) « je voudrais pour 2022? »
– « Je t’arrête de suite » dit le père, un homme très vif d’esprit : « ton cadeau tu l’as eu, on n’en parle plus »
– « Pardon Papa, en effet, alors pour l’an prochain …»
– « Hum, c’est bien loin » dit le père, « et ce n’est pas très aimable pour le cadeau de cette année. Mais bon, que veux-tu pour 2023 »
– « Des points Elo. Il m’en faudrait»
– « Mais pourquoi ? » demande le père. Il connaît la réponse mais pas précisément.
– « Pour gagner contre Ernest-Emmanuel »
– « Mais pourquoi? » demande le père, distraitement.

A la cuisine, la mère qui lit le Monde et qui surveille l’étrange repas préparé par son mari, est intriguée par la question.

– « Parce qu’il gagne tout le temps. » dit l’enfant, supplicié.
– « Bien bien », dis le père, « je vois, OK, eh bien ton cadeau 2023 je vais te le donner tout de suite. Des trucs imparables, ça te va?»
– « Oh merci Papa ».

Ce sera toujours ça d’économisé se dit le père. Il ne sait pas trop ce qu’il va dire. Un mauvais moment à passer. Mais il sait que dans 5 minutes il sera devant son journal, et que l’enfant, ravi et dans sa chambre, sera en train de noter des trucs incompréhensibles.

– « Voyons : pourquoi perds-tu contre Martial-Régis? »
– « Ernest-Emmanuel »
– « Oui pourquoi perds-tu ? »
– « Je ne sais pas » dis le fils qui ajoute après un petit moment : « quand je joue un bon coup il joue un bon coup aussi, et petit à petit il gagne et je suis mat »
– « OK je vois » dit le père.

La mère a arrêté de lire et écoute. De son côté, le père a enregistré que les pages du Monde ne se tournent plus.

– « si on joue un bon coup après ton bon coup, c’est que ton coup n’était pas si bon, vrai ou faux? »

Le fils qui connaît son père hésite.

– « Peut-être »
– « Tu joues à l’aveuglette contre Martial-Régis … et les autres, voilà ce qu’il se passe».

François-Baptiste ne dit rien. Le père poursuit

– « Un coup n’est bon que si on ne te joue pas un coup bon juste après. Sinon, ton coup n’est pas bon. Il te plait juste. Il est, au mieux, beau. Mais le beau ne fait pas tout »

Le père a élevé la voix pour que l’enfant entende bien. Il continue :

– «L’adversaire doit être empêché de jouer un bon coup. Dis-toi que ton adversaire est un délinquant et qu’il faut laisser en prison autant de choses de lui que possible : un bras, un pied etc ».

Pas mal ça se dit le père plutôt habitué à des désastres quand il improvise.

– « Mais comment reconnaît-on un coup bon d’un coup beau ? » demande l’enfant très vite pour éviter de penser au prisonnier coupé en morceaux.
– « La pièce que tu as jouée pour ton beau coup, en réalité, là où elle était, elle était bien. Car elle gênait l’adversaire. Qu’est-ce que tu en sais pas ?» Tout en parlant il se demande si c’est bien français. « Qu’est ce que tu-en-sais-pas ? » répète-t-il comme s’il citait une phrase célèbre. « Tu as perdu un avantage en la bougeant. Un avantage que tu aurais pu garder et en avoir un autre par dessus le marché. Les échecs sont une accumulation de petits bénéfices. Dans tes bénéfices il y a des maléfices pour l’adversaire. Un maléfice c’est moins de choix. Si chacun joue un bon coup, ce ne sont plus des coups mais des gnons. On est dans une pièce toute noire et on donne des gnons dans tous les sens en espérant gagner par KO ».

Le fils rit. Il s’interroge

– « Comment je sais qu’elle gênait mon adversaire. »
– « L’observation » dit Monsieur queue de poisson (il est réputé dans le quartier pour ça) et, après un temps, « et le cerveau «

Il répète haut et distinctement pour que l’enfant entende bien. Il détaille :

o « les pièces, où sont-elles ? Voilà c’est la géographie! »
o « la pièce, son rôle, son influence : c’est la politique !»
o « Que faut-il le moins bouger pour avoir un maximum d’effets ? C’est l’économie !»

– « Va maintenant » conclut le père qui a le projet de noter tout ça rapidement.

L’enfant se dresse et se demande ce que ça va donner et que veut dire influence. Il file chez Ernest-Emmanuel. Le père a un peu mal à la tête et va s’allonger. Les pages du Monde se remettent à tourner.

Plus tard, l’enfant remonte, il sonne. Tu vois dit le père qui va ouvrir, les échecs ont du bon, notre enfant devient adulte il comprend qu’on n’entre pas chez les gens comme dans un moulin, même chez soi. La porte s’ouvre sur un agent de police. C’est le père d’Ernest-Emmanuel qui vient annoncer que leur voiture est à la Fourrière et que leur fils est à l’intérieur. Et que c’est bien fait.

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