A la gare St Lazare, la foule de la semaine a fait place au calme du dimanche matin. Dans les espaces trop grands, les gens convergent mollement vers des trains qui vont partir à un rythme de sénateur vers l’ouest, à peu près vides.
Dans l’un d’eux, on prend un compartiment où est installé un amateur de golf. Apparemment retraité, cet aimable spécialiste parcourt le monde avec la SNCF, allant de golf en golf. Arrivé à destination, il regarde le ciel, le sens du vent et le plus souvent descend, tape dans la balle, la suit, retape dedans et au bout de 4 heures et après 10 km remonte dans son wagon.
On a envie de rire mais la même pensée nous assaille : au bout de 5h et après avoir fait faire 5 m à des petits bouts de bois sur un mini parcours noir et blanc on repart, la tête enflée. Qu’en pense-t-il notre golfeur?
Une voiture est partie des Yvelines avec le reste de l’équipe. Le conducteur a conduit comme il joue : bien et vite. On imagine Philippe à la place du mort, cramponné, essayant de distinguer sous la pluie le prochain virage et Pascal, calme et droit à l’arrière, un peu assommé par le bruit conjugué du moteur et de la radio, rêvant d’écouter du Léo Ferré, allongé tranquillement, dans le silence ouaté d’une ambulance.
Dominant la place principale comme une tour de contrôle, fonctionnel, spacieux, le centre administratif Victor Hugo de Lisieux est un bel espace. Les conditions de jeu sont excellentes.
Lisieux est avant dernier du groupe Ouest. Ce classement ne reflète pas la valeur de cette équipe de jeunes emmenée par un très bon 2300 et qui possède une des meilleures féminines du groupe. Cela ne nous a pas échappé. Chacun de nous aura un adversaire de sa force. Ce match est un vrai test.
Le Vésinet – Lisieux
1N Stephen JESSEL 2294 -Nicolas COURSAGET 2317 : 0-1
2B Pascal DESLANDES 2314 – Jean-Fabien DECOSSE 2237 : 1/2
3N Laurent LARGE 2240 – Stephane CROUTTE 2193 : 1/2
4B Rémy BONNAUD 2215 – Maxime MARIE 2236 : 1/2
5N Philippe GLOD 2181 – Pierre LE BORGNE 2212 : 1/2
6B Laurent CASTAIGNET 2184 – Denis BARBINI 2130 : 1-0
7N Christophe IMBERT 2107 – Emilie MARCHADOUR 2072 : 1-0
8B Maud MILLET 1960 – Paul BLANCHE 2105 : 1/2
- Stephen ne prend pas sa revanche sur Coursaget. Le début de leur Slave avec roques opposés laisse pourtant présager l’inverse. Mais Stephen fait un mauvais choix de reprise en ç4 et son attaque stoppe. En finale, il a tort de permettre à un cavalier blanc de s’installer en h6. Le champion de France junior 2006 est paralysé mais résiste ce qui met son adversaire en condition de saisir ce qu’il croit être sa chance : le pion passé h contre l’abandon de la pression. Erreur : objectivement c’est nulle mais le temps et la fatigue provoquent une faute de Stephen qui perd.
Pascal a l’avantage d’espace dans une moderne/Pirc. La crise sur les cases noires ne provoque pas l’effondrement de la formation adverse. Comme souvent dans ce match, la tension qui a précédé et la force de l’aversaire, font apparaître la nulle comme un résultat honnête. Nulle.
Laurent joue un gambit Benko avec lequel il est familier. De part et d’autre on récite un peu. Et puis Laurent, mis en confiance par un coup adverse qu’il juge inapproprié à la sous variante qu’il a choisie, joue un bien tentant Cc4. Le pion est regagné mais la position perd toute consistance et c’est une nouvelle nulle.
Rémy joue très activement une Pirc avec les blancs. Ses pièces sont à l’attaque, menaçantes. Son adversaire est vigilant. Tout en prévenant les menaces tactiques adverses il développe son propre jeu. Rémy n’est pas enclin à accepter une bataille longue et malgré son pion de plus accepte la nulle.
Philippe est fidèle à la variante Smyslov avec les noirs. Les fous noirs sont échangés et les roques opposés. Il affectionne cette position solide où le fou de case blanche est puissant. La lutte s’équilibre longtemps. Dans la crise de temps mutuelle on voit Philippe démolir les dernières défenses blanches. La victoire est là mais notre joueur est sous la menace d’un duo dame-cavalier et préfère éloigner tout risque en provoquant la nulle.
Laurent joue un Pirc qui ne va être qu’ébauchée. Au vu du jeu noir, il diffère le développement du Cf3 et lance le pion h jusqu’à h6 ! Les noirs se lancent alors, on ne sait trop pourquoi, dans une chevauchée de leur dame qui va aller s’en prendre à b2 au péril de sa vie. Laurent n’en demandait pas tant et trouve la séquence qui permet de l’empocher. Une victoire précieuse, rapide qui va peser sur le match.
Christophe a les noirs. Après les échanges en d4 de la variante Kérès de l’Espagnole, la dame blanche revient en d1. Plus tard les blancs s’installent au centre. Mais c’est solide pour les noirs et on s’achemine vers la nulle en finale de pièces lourdes. C’est alors que les blancs éloignent une tour laissant la dame bien esseulée pour défendre son roi contre la dame et la tour adverses. Le joueur du Vésinet remporte deux pions et gagne la finale de tour.
Maud avec les blancs lutte contre une Slave. Son adversaire est mieux classé et est décidé à attaquer. Alors Maud est très prudente. Elle repousse une initiative à l’aile roi et plus tard prend le contrôle de la partie à l’Ouest. Les dames ne sont plus là et son cavalier est supérieur au fou. Mais le temps travaille contre elle car la partie dure et elle doit prendre un train en début de soirée pour cause de correspondance à Paris. Aussi, lorsqu’on la lui propose, elle accepte la nulle.
Vistoire 2-1
Photos de Rémy Bonnaud