Bien installé sur un strapontin (les connaisseurs savent que c’est là qu’on est le mieux), le RER, c’est une balade, même quand les conducteurs sont disposés à rouler. Il faut simplement quitter des yeux son journal. C’est même pittoresque en période de vacances et plus encore pendant les fêtes de fin d’année.
Cette fin d’après-midi là, une mamie et son petit-fils reviennent de Paris. Ils ont fait des emplettes et la journée a été fatigante. La vieille dame souffle. A leurs pieds, il y a les courses dans de gros sacs de Noël.
Lui rêvasse
Pour les grands-mères, les sorties avec les petits-enfants sont des challenges. Celle-ci est décidée fermement à le relever jusqu’au bout. Qu’y a-t-il dans ces sacs? Pour égailler son petit-fils, la dame âgée en fait l’inventaire. Exclamations, examens à la lumière d’objets variés, excitations : tout le wagon suit l’affaire. La mémé parle, commente. Lui écoute, examine complaisamment les objets qu’on lui présente, acquiesce et sourit devant l’enthousiasme de la vieille dame. Il pose de rares questions et quand il le fait elle écoute religieusement car ce ne sont jamais des questions anodines mais toujours logiques, presque redoutables. Et pendant qu’elle y répond, avec soin, en pesant ses mots, le regard du garçon se perd, comme pour ranger soigneusement l’information, la classer et parfois la laisser planer et attendre de voir ce qui, dans son esprit, va s’éclairer en sa présence. La moisson est souvent bonne avec cette mamie là, intarissable, attentive, expérimentée. Du grand spectacle.
C’est bien gentil, mais quel rapport avec les échecs? N’est-ce pas ce que ressent tout professeur face à un bon élève?
Peut-être…J’ai pensé pendant le trajet qu’il y avait de très faibles probabilités que ce garçon fut un joueur d’échecs et sa mamie un entraîneur de l’ex-Union soviétique (par exemple alors que nous passions au « Vésinet-Centre », ils n’eurent pas un regard pour la maison du combattant!). Il y a donc peu de chances qu’on les retrouve dans un tournoi. Mais prudence quand même! Depuis ce jour, j’ai replacé sur ma route le livre de Villeneuve sur les finales.
Bonne année à tous