Le jeu d’Echecs semble avoir inspiré les artistes depuis qu’il fût inventé au Vème siècle.
Nous vous proposons un texte écrit par Charles d’Orléans. L’auteur, fils de Louis duc d’Orléans assassiné en 1407 à l’instigation de Jean-Sans-Peur duc de Bourgogne, participa à la bataille d’Azincourt en 1415. Cette défaite française fût celle de l’indiscipline de la chevalerie face à la « piétaille » anglaise. Louis d’Orléans fût emmené en captivité en Angleterre où il demeura 25 ans ! Il eut ainsi le temps de réaliser une importante et intéressante production littéraire.
Nous vous proposons de découvrir l’un de ces poèmes : la ballade du joueur d’Echecs
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J’ay aux eschés joué devant Amours
Pour passer temps , avecques faulx Dangiers,
Et seurement me suy gardé tousjours
Sans rien perdre jusques au derrenier
Que Fortune lui est venu aidier
Et par meschief que maudite soit elle
A ma dame prise soudainement
Par quoy suy mat, je le voy clererement
Si je ne fais une Dame nouvelle
En ma Dame j’avoye mon secours
Plus qu’en autre car souvent d’encombrier
Me delivroit, quant venoit a son cours
Et en gardes faisoit mon jeu lier,
Je n’avoie Pion ne Chevalier,
Auffin , ne Rocq qui peussent ma querelle
Si bien aider. Il y pert vrayement
Car j’ay perdu mon jeu entièrement
Si je ne fais une Dame nouvelle.
Je ne scay jamais garder des tours
De fortune, qui maintes foiz changier
A fait mon jeu et tourner a rebours ;
Mon dommage scet bien tost espier,
Elle m’assault sans point me déffier
Par mon serment oncques ne congneu telle
En jeu party suy si estrangement
Que je me rens et n’y voy sauvement
Si ne fais une Dame nouvelle.
Un lexique semble le bienvenu pour éclairer si besoin cet extrait du ‘Livre que monseigneur l’Orléans écrivit dans sa prison’ :
Meschief = par malheur
D’encombrier = embarras
Auffin, ne Rocq = Fou, ni tour
Pert = parait
Party = alternative
Congneu = compris, connu
Oncques = jamais