L’équipe joue à Rouen le samedi. Dans cette dernière ligne droite, la voiture des Yvelines peine sur l’axe St Germain – Poissy – Orgeval où on l’attend, successivement. Sensée partir tôt, elle se retrouve sur l’autoroute inondée de lumière derrière la voiture partie de Convention. A Rouen, au palais de la Bière, nous évitons de boire et de parler du match, craignant l’un et imprégné par l’autre.
Ce week-end est décisif : d’après 6 experts de l’équipe, il faut gagner un match pour se maintenir et gagner les deux pour avoir une chance de monter. D’après le 7ème expert, on peut perdre les deux et se maintenir et il suffit de gagner un seul match pour avoir les mêmes chances de monter. Le 8ème, morose, ne s’exprime pas, pressentant sans doute le séisme politique du lendemain.
Le Vésinet- Rouen
1B Pascal DESLANDES 2270 – Samy DESBONNES 2287 : 0,5
2N Stephen JESSEL 2285 – Victor GERVAIS 2299 : 1-0
3B Laurent CASTAIGNET 2167 – Sherif MEDGHOUL 2171 : 1-0
4N Laurent LARGE 2224 – Samir ADYEL 2127 F : 0,5
5B Eric CHEYMOL 2161 – Nicolas SALAUN 2106 : 0-1
6N Philippe GLOD 2155 – Benoit LEBRUN 2124 : 0,5
7B Christophe IMBERT 2085 – Antoine DUBOC 2086 : 0,5
8N Adeline CHAUMONT 2023 – Emilie PRIEUR 1673 : 1-0
- Pascal attend un peu de voir, dans cette Sicilienne système Kopec (lâchons nous) avec c3-Fd3, opposé au fianchetto Dragon, ce que fait son redoutable adversaire. Il le prend en filature en quelque sorte et analyse avec grand soin les moindres perspectives noires. Il surveille les velléités d’attaque comme un garde champêtre les départs de feu en 76. Son examen semble ne révéler rien de mal et c’est lui plus tard qui manoeuvre autour du roi ennemi et qui finit par prendre la nulle.
Stephen se retrouve dans une Cambridge Springs de la Slave, ce qui peut survenir quand les blancs ne veulent pas arriver dans une française alors que les noirs les y invitent fortement. Une partie qui va durer 40 coups et se terminer de façon tout à fait dramatique. Stephen lutte pour la nulle dans une finale de paires de fous de chaque côté. Il a un pion de moins. Tout à son affaire de calcul pour optimiser ses chances, le joueur de Rouen ne voit pas se profiler un mat par les deux fous. Une victoire inattendue mais très précieuse.
Laurent s’enfonce dans une française d’avance. Il affectionne les positions où l’adversaire est empêtré. Il a donné un pion pour cela. Effectivement les noirs souffrent d’un manque de développement. C’est précisément un problème de redéploiement adverse qui permet au joueur du Vésinet de lancer une attaque brutale sur le roque avec ses deux cavaliers à l’instar de Fischer qui disait: « sacrifice, sacrifice et mat » en décrivant sa stratégie contre le dragon. Nouvelle victoire de Laurent, particulièrement efficace cette année.
Position après 24.. Cc6-e7
25.Cxg7! 25…Rxg7 26.Dg5+ Cg6 27.h5 Tc8
28.Df6+ Rg8 29.Cg5 (2ème sacrifice) Txc1
30.Rh2 Cxe5 (protéger f7 ne suffit pas)
31.dxe5 Dd3 32. Df7+ Rh8 33.Df8#
Par petites touches avec les noirs Laurent influence le jeu et tend à le faire ressembler, si ce n’est pas à une moderne, du moins à une de ses cousines. Les deux adversaires se craignent. La mémoire encyclopédique de notre joueur a ramené à la surface on ne sait quelles bribes d’information sur son adversaire et il ne cherchera pas le coup dur. Sans en avoir décidé avant, l’importance du match fait que chacun dans notre équipe se satisfait de la nulle, comptant sur l’autre pour rapporter des points. Nulle en 25 coups.
Eric est dans une sicilienne Paulsen (a6,e6, Cc6, Cf6). Ce n’est pas un jeu de position et les pièces à longues distance s’en donnent à coeur joie. Au 28ème coup Eric sacrifie la qualité sur le fou e6. Le thème est correct mais le moment mal choisi car il restera avec une qualité de moins. Il se bat jusqu’au bout, tachant de valoriser une majorité de pion, et espérant arriver dans une étude. Mais l’adversaire tient sa victoire et ne la lâchera pas.
Dans le gambit Steinitz de la Viennoise, (1.e4 e5 2.Cc3 Cc6 3.f4 exf4 4.d4 Dh4+ 5.Re2), la défense Zukertort est constituée par 5..d5 . Philippe joue d6 et ce verrou sera une sécurité pour l’adversaire et cela explique – peut-être – pourquoi Philippe n’arrive pas à tirer quelque chose des promesses de la position. Nulle en 18 coups.
Comme d’autres joueurs de Rouen, l’adversaire de Christophe est un ex de Maromme, club maintenant disparu. Le joueur du Vésinet est très concentré est obtient assez vite une position favorable avec un gain de pion possible. Il le garde en réserve car il va essayer d’optimiser à la façon des maîtres. Cela dure un petit peu et puis tout à coup, rompant avec cette stratégie et voulant valoriser la paire de fous, il ouvre. Le résultat est un peu désastreux car ensuite il doit se battre pour la nulle. Celle-ci est finalement conclue, facilitée par le découragement adverse car alors le match est perdu pour Rouen.
Dans un début du pion dame avec 3. g3 et 4.Fg2. La partie se décante plutôt lentement. Adeline repousse puis tient à distance des blancs entreprenants. Les dames et pièces lourdes sont conservées ce qui peut être un gage de partage du point parfois mais aussi ménager des fins brutales comme ce sera le cas avec un superbe 45.Th4 de la joueuse du Vésinet qui met fin instantanément à la partie.
Position après 44.Ce4
44.. Rc7 45.Cxf6 Th4+ 0-1
Au « Palais de la Bière » l’ambiance est détendue. Cette victoire nous satisfait pleinement. Nous maintenons la pression sur les trois équipes qui nous précèdent, sachant, il faut le rappeler pour la 14ème fois, que nous les avons toutes battues. Un de nos concurrents, Issy les Mlx qui jouait à côté de nous aujourd’hui, a perdu contre un autre prétendant : Gd Quevilly. Il n’en reste donc que deux: JEEN et Grand Quevilly qui doivent rencontrer deux fortes équipes : Rouen et St Quentin-en-Yvelines, deux équipes qui, de surcroît et comme beaucoup, sont menacées de descendre. En cas de faux pas des leader, nous passons devant.
Mais avant, il y a l’écueil Tour Blanche, une équipe tout sauf mauvaise, qui a gagné aussi contre JEEN et qui se retrouve, à sa propre surprise à coup sûr, en dernière place. Le match piège par excellence.
Le match a lieu au Vésinet
Le Vésinet Tour Blanche
1N Stephen JESSEL 2285 – Claude DRAUART Jean- 2193 : 1-0
2B Laurent LARGE 2224 – Ludovic GANTNER 2171 : 0,5
3N Pascal DESLANDES 2270 – Benoit LECLERCQ 2122 : 1-0
4B Philippe GLOD 2155 – Fabrice MONDON 1995 : 1-0
5N Laurent CASTAIGNET 2167 – Cyprien DENOUS 2000 : 0,5
6B Rémy BONNAUD 2179 – Pierig TREGUER 2002 : 0,5
7N Eric CHEYMOL 2161 – Jean-Pierre TILQUIN 1978 : 1-0
8B Adeline CHAUMONT 2023 – Carine GAUFFRIAUD 1830 : 1-0
- Si Laurent L fait toujours un peu des modernes, Stephen n’est jamais très loin des Réti. Son adversaire a dû maintes et maintes fois donner le pion c4 ainsi qu’il le fait aujourd’hui, mais il ne le reverra plus et n’obtiendra rien non plus en compensation. Calculant précisément, le joueur du Vésinet poursuit son développement sans se laisser distraire. Quand tout est en place, il joue c5, coup auquel l’adversaire doit précisément répondre. Ce n’est assurément pas le cas car au 18ème coup la partie est finie, et les pièces rangées dans la boîte. Ce week-end, Stephen aura fait 2/2 avec les noirs.
Laurent prend l’un des deux jeunes adversaires qui ont un je-ne-sais-quoi qui fait dire qu’ils doivent exceller en parties rapides. Laurent joue Ff4 dans la Tromposky et les conditions lui semblent favorables pour donner un pion afin d’accentuer la pression, façon Benko. L’adversaire est dur à manoeuvrer et la partie continue sans que le pion ne soit rendu. L’occasion va se présenter sous la forme d’un échec perpétuel que Laurent va saisir.
Pascal est confronté au deuxième jeune dans une Est-Indienne avec Fd3. Le joueur de Tour Blanche va consommer 1 heure sur le coup 9…d5 de Pascal. Au 13ème coup il ne va lui rester qu’une minute. Ni l’un ni l’autre ne semble perturbés pas ce manque de temps. Pascal a immobilisé un cavalier adverse en d4, uniquement protégé par des pièces. Il brode autour de ce thème et finit par mettre la dame blanche hors jeu grâce au thème de la surcharge. Il pénètre ensuite au coeur de la position adverse avec sa propre dame pour s’en prendre victorieusement au roi blanc.
L’adversaire de Philippe joue une Scandinave avec Ff5. Philippe joue Fc4 puis grand-Roque. Son coup a3 est une invite à sacrifier. C’est dangereux mais l’adversaire sait qu’il n’aura peut-être pas d’autre occasion avec ce fichu adversaire classé 160 points de plus. Philippe finit par voir Ca2 sur Fxa3. Il souffle. C’est sans doute aussi la raison pour laquelle l’adversaire renonce. Du coup sa dame est mal placée. Il va croire pouvoir la donner pour des pièces. Ce sera notablement insuffisant. Après celle de Stephen et de Pascal, une victoire de plus.
Position après 14.a3
Fxa3, un sacrifice tentant
14…Fxc3 après une grosse réflexion
15.Fxc3 Da4 16.Td4 la dame a de gros ennuis.
15…c5 16.Fb5 cxd4 Fxa4
Laurent et son adversaire jouent une Alapin (1.e4 c5 2.Cf3 d6 3.c3 Cf6 4.Fd3 ). Les blancs sont à la manoeuvre malgré leur 160 pts de moins et donnent l’impression de prendre les choses à leur compte. Laurent est dans une position resserrée et essaie de ne pas perdre de vue la nulle. Il ouvre l’oeil, à l’affût des possibilités qui la laisserait se rapprocher. C’est le cas quand les blancs échangent leur fou de cases blanches. A partir de là personne ne peut plus rentrer dans cette finale avec fou contre cavalier.
C’est un gambit Smith-Morra que jouent Rémy et son adversaire. Un point de fixation se crée que Rémy n’arrive à faire tourner à son avantage. Quand les dames s’échangent, la nulle est proche. A 3-0, chaque nulle est bonne à prendre.
Personne n’aime trop la position d’Eric dans cette Pirc. L’adversaire a repoussé les noirs sur les 3 dernières rangées et a beaucoup d’options. Les possibilités d’Eric sont quant à elles limitées. L’une d’elles qui le soulagerait est l’échange des dames…et l’adversaire accepte. A partir de là, les choses vont sérieusement mieux car le fou de cases blanches est quasiment dominé par le cavalier f6. Elles s’arrangent tout à fait après l’intrusion de la tour d’Eric. Cette partie rapporte un 4ème point.
Adeline a fort à faire dans ce gambit dame. Son adversaire est très cohérente dans la pression qu’elle met. Adeline ne pourra souffler qu’au détriment de sa structure de pion. Ensuite, les noirs s’en prennent au pion d4 isolé, dont la défense coûte cher en immobilisation de pièces. C’est un guépier qui doit donner au mieux la nulle. Et puis tout à coup la dame adverse préfère assurer la nulle en défendant plutôt qu’en menaçant. A partir de là, la moindre erreur va être fatale aux noirs. Adeline met la pression et l’erreur survient. C’est la 5ème victoire.
Pour fêter cette victoire, le 8ème expert propose de retourner au Palais de la Bière qui deviendrait notre point de ralliement. Deux victoires. Les appareils électroniques sont rallumés pour voir ce qu’il s’est passé en tête. Et puis des cris et des youyous. Rouen a gagné contre Grand-Quevilly. Nous sommes en N1. La prédiction du président Marchand après notre victoire de la ronde n°1 sur Issy-les-Moulineaux s’est vérifiée.
JEEN nous accompagne en N1. St Quentin-en-Yvelines, Tour Blanche et Rueil descendent.