C’est la reprise. Après deux mois, les Echecs reprennent. Ce sont les deux dernières rondes.
Une ronde groupée à Caen, à l’ancienne, avec nuit sur place. Nous avons perdu le réflexe de bouger. Quitter un canapé n’est jamais aussi simple que ce que les parents essaient de faire croire.
Pascal nous fait une « Rémy » au départ. C’est rare de l’attendre car il est plutôt du genre en avance. Enfin, on entend sa voiture, une Visa. On la voit avant de la voir : des enfants se sauvent, des mères serrent leurs sacs à main. La Visa finit par apparaître, rageuse, au coin de la rue. Elle grossit, nous passe devant et disparaît suivie par les aboiement des chiens. « Rien ne va » dit le chauffeur sans déserrer les dents quand il a rejoint le groupe.
Le Vito a été accidenté et c’est un fiat qui attend ses passagers. Comme à leur habitude, les joueurs de e4 montent en 1er. Tout est OK apparemment. C’est rustique mais on voit dehors cette fois.
L’équipe fanion du Vésinet joue la montée. Elle s’est habituée à ce statut de prétendant légitime. Ce n’est pas vieux pourtant. Cela date du 27 janvier jour où, à l’extérieur, Quimper a gagné contre l’Echiquier de l’Erdre. Ce jour là Le Vésinet gagnait contre la valeureuse équipe de Tours. Le match important, du coup, était juste derrière : ce fut la victoire du Vésinet contre l’échiquier de l’Erdre avec en point d’orgue la partie Peio Duboué – Stephen Jessel et la victoire du joueur du Vésinet. C’était le 9 février. Une éternité.
Le plus dur a été fait? On va s’apercevoir très vite que non. Tout était à réécrire. Tout est toujours à réécrire
Le Vésinet – Caen : 4-2
1N RABEYRIN Jean-Jacques 2230 – LAPLANCHE Denis A 2192 : 0-1
2B JESSEL Stephen 2301 – LEJEUNE Gael A 2112 : 0,5
3N DESLANDES Pascal 2280- THEREZE Ludovic 2008 : 0,5
4B CHEYMOL Eric 2125 – HELIE Marc A 2070 : 0-1
5N DIVIES Renaud 2118 – ZERAFA Jonathan A 2051 : 1-0
6B IMBERT Christophe 2056 – CHATELIER Christian A 1970 : 1-0
7N LOGIE Marc 2034 – JOPHE Jacky A 1863 : 1-0
8B CHAUMONT Adeline 1999 – POIRIER Annabelle A 1673 : 1-0
- Jean-Jacques dans une défense semi-slave gagne un pion au 9ème coup avec les noirs. Après, il s’ensuit un long combat. Les blancs ont sagement gardé les Dames. Tout à la fin, Jean-Jacques voit son roi poursuivi par le couple Dame / cavalier, un duo dangereux. Les échecs se succèdent et le roi monte, passant sous le nez du cavalier ennemi. Puis le monarque stoppe net, les narines frémissantes, flairant le danger. Mais il est trop tard. Une fourchette royale est là, dans un renfoncement. Le coup est forcé, le roi doit entrer dans le piège. Abandon. C’est une des dernières parties. Le match n’est plus gagné! A ce moment, tout va dépendre d’Adeline au 8 .. qui a un pion de moins.
Stephen est dans une anglaise, système orang-outan. L’aile Dame est l’enjeu. Comme à son habitude, il n’est pas avare de son temps. Au 20 ème coup, il n’a que les 30 secondes que Fischer accorde à chaque coup. Sa structure de pion est plus saine mais il reste les dames. Elles sont esseulées et la position est ouverte. Nulle
Dans la variante d’avance de la Française ça ne traîne pas pour Pascal qui joue f6 très vite. Le centre noir est fort. Son adversaire joue très bien dans une position où il aurait pu être débordé. Il consomme du temps mais ne perd pas pied. Nulle, juste après le contrôle du temps.
Eric joue une défense sicilienne, variante hongroise. Il ne jouera pas d4 et son adversaire va alors lui même pousser d4. La position va se bloquer un temps puis à nouveau les pions noirs vont avancer. Le verrou d3 va sauter libérant « d » des noirs qui va finir par être promu. Grosse déception d’Eric.
La partie de Renaud est incroyable, un incroyable Benko. L’adversaire ne prend pas le pion et navigue en terrain manifestement connu. Renaud perd la bataille du Centre. Le virus se propage à l’aile roi. Le roi noir de Renaud est agressé. Il s’attend au pire et en attendant tient. Et l’attaque s’essouffle! Et puis au 30e, par h5 les blancs verrouille eux-mêmes l’aile roi avec leur fou en g6! Ca repart de l’autre côté mais dans ce secteur les noirs ont l’avantage. Victoire noire, oh combien importante dans cette course à la montée.
Christophe dans une Pirc essaie de tout obtenir : pièces actives et avantage d’espace. Il a lu dans les livres qu’il fallait croire dans ses choix, aller de l’avant et ne pas s’attacher sentimentalement aux pièces. Il va falloir attaquer les livres d’Echecs. Son adversaire aussi a confiance dans la position notamment grâce à un cavalier e6, en mesure de valoriser l’ensemble du dispositif. Du coup il n’échange pas le fou de cases blanches ennemi. La Dame blanche s’insinue sur la 8ème et les fous vont être surpuissants. Après celle de Marc, 2ère victoire du match.
Dans une ouverture anglaise, système de Brême, Marc avec les noirs, après le 12ème coup blanc (e4 au lieu sans doute de d4) va profiter d’une situation plutôt difficile à gérer côté blanc. Cela va donner un pion. Les blancs vont faire l’effort pour obtenir des compensations mais rien ne va y faire. Victoire noire, la 1ère du match.
Adeline est la dernière à finir. Dans le match, il y a 3-2. Une nulle suffit. Mais elle n’a rien obtenu dans la partie. Pire, c’est son adversaire qui a un pion de plus dans cette dernière phase avec Dames et fous de couleurs opposés. Si Adeline ne bouge pas, le pion de plus ne passe jamais sur les cases blanches. Pas si sûr car les noirs peuvent peut-être forcer cette batterie à quitter la diagonale. Peu après, coup de tonnerre : la joueuse du Vésinet a un fou de plus. Quelle est cette magie. Sur une inattention noire, Adeline a poussé son pion à Dame et fait une fourchette. Ce gain porte le score à 4-2.
Cette victoire sera dignement fêtée chez Patoch. Patoch et sa cuisine familiale et son apéritif » cornes de brume ». Ce gain du samedi semble suffire totalement à notre bonheur comme s’il parachevait la saison. Nous avons oublié qu’au samedi succède le dimanche. Il reste un match contre une équipe arrivée à Caen avec une grande motivation : Cherbourg – Octeville. Ils viennent de perdre contre Lisieux, durement, et ne sont qu’à une encablure du 1er relégable. Les joueurs de la Manche ne veulent pas rester en rade et il ne fallait pas être devin pour savoir qu’ils mèneraient un âpre combat
Le soir nous verra nous balader dans le centre de Caen. Pas une pierre n’est restée debout dans cette ville, en principe, après les combats du débarquement. C’est donc avec quelques hésitations qu’une main interrogative se tend vers les remparts en surplomb. En qualité de 2ème du groupe, nous nous sentons autorisés à avoir des avis sur à peu près tout : on explique gentiment à l’ignorant que tout ce qui est vieux ici est neuf, malgré les apparences. C’est très simple et très bien imité. Nous ne somme pas loin d’y croire et nous déambulons du coup avec une certaine admiration pour tous les artisans qui ont bien travaillé ici.
L’échiquier de l’Erdre, malgré un forfait, n’a pas fait de détail : 6-1 contre Avoine. Nos deux autres poursuivants, Malakoff et Quimper sont un peu décrochés après leur nulle entre eux : ils sont à 2 points. Ces deux équipes avaient un forfait au dernier échiquier. Les fins de saisons sont toujours un peu dures.
Le Vésinet – Cherbourg : 3-4
1B DESLANDES Pascal 2280 CHAPLAIN Fabrice 2117 : 1-0
2N JESSEL Stephen 2301 BOURDONNAIS Loic 2173 : 0-1
3B RABEYRIN Jean-Jacques 2230 – GALLON Willy 2034 : 1-0
4N DIVIES Renaud 2118 LEPIGOCHE Cyril 2094 : 0-1
6B LOGIE Marc 2034 LELONG Eric 1967 : 0,5
7N IMBERT Christophe 2056 LEGOUPIL Benoit 1943 : 0-1
5B CHEYMOL Eric 2125 BENARD Anne-Laurie 1918 : 0-1
8N CHAUMONT Adeline 1999 DUBOIS Delphine 1674 : 1-0
- Pascal a les blancs dans une Alapin. Les noirs jouent 12…g6. Pascal ne force pas le « train où vont les choses » depuis que son centre a été renforcé par bxc3 et sait qu’il va récolter les fruits de sa position « bourgeoise ». Sur 20. a4 les noirs auraient peut-être pu prendre. Victoire au 55ème contre un très bon adversaire qui a eu la malchance de tomber lui même sur un très bon joueur.
Stephen avec les noirs dans une anglaise, système Caro-Kann, prend du temps. L’adversaire, il le connaît. Il a fait nulle avec lui au début du tournoi qui le fit devenir champion de France. Cette fois encore les choses ne sont pas faciles. Les blancs n’hésitent pas à compliquer et Stephen doit défendre. L’adversaire sacrifie en g7. Stephen est en crise de temps. Il se défend parfaitement et a sans doute l’avantage puis se croit obligé de prendre un pion et perd un temps alors qu’il est sur le fil du rasoir. Ca finit par devenir fatal
Loic BOURDONNAIS – Stephen JESSEL
Position avant 25..hg5
La partie continua par 25..hxg5 26.Cxg5 +-
Jean-Jacques est fort mentalement. Il n’a rien laissé paraître après son défaite d’hier. Au 14 ème coup dans la variante Tarrasch fermée de la Française, les noirs jouent Dd6 (on joue plutôt Txf3) et juste après donnent un pion par 15…e5. Jean-Jacques ne lâchera plus l’avantage net blanc qu’il obtient. Une victoire précieuse car déjà Eric et Renaud ont perdu et Christophe est en crise de temps.
Renaud est face à l’adversaire qui a infligé à Lisieux sa seule défaite la veille. Il va se confirmer que c’est une jouer un peu exceptionnel, osons le dire (il faut savoir prendre des risques). C’est Renaud qui choisit un chemin rare du Système Botvinnik de l’Anglaise (7..e6) mais surtout avec le fianchetto Ouest (b6 et Fb7). Au 15ème coup il reprend du pion b et cela marque le début de l’avantage blanc qui sera transformé en essai.
Marc avec les blancs dans sa partie bloque la position sur cases noires par 10.d5. C’est un jeu de position dont il va sortir vainqueur peut-on dire car il restera sur l’échiquier les fous de cases noires et un pion de plus. Mais ce ne sera pas suffisant pour gagner malgré la grosse envie de l’équipe qui voyait dans une manoeuvre de contournement sophistiquée une façon d’annuler le match. Mais ce sera nulle.
Christophe se félicite de sa position dans une Sicilienne fermée avec les noirs où les blancs se voient contraint de défendre c2 avec des pièces qui devraient attaquer. Il discute avec Malakoff prend des photos et regarde régulièrement, par pure curiosité, où en est le buffet auquel le Vésinet n’a pas droit faute de s’être inscrit à temps. Le temps passe et la position se détériore gentiment. Il entre dans la zone fatidique des secondes Fischer et bientôt, très calme, se noie. 3-0 pour Cherbourg.
Les bulles s’accumulent et une impression de « déjà vu » s’insinue chez les joueurs des Yvelines.
- Eric a été le 1er en encourir les foudres de Cherbourg avec les blancs. Une sale partie peut-on dire pour le joueur du Vésinet ce qui ajoute aux mérites de la joueuse adverse. Ils suivent une partie Lopez de segura – Leonardo Rome 1560, une sorte de gambit du Roi refusé. La suite entamée avec 12 Da4, ne reprenant pas le pion d4 et laissant aussi e4 en l’air ne tient pas ses promesses. Les blancs sont empêtrés et les noirs en ressortent très actifs.
Eric Cheymol – Anne-Laurie BENARD
Les blancs viennent de jouer 12.Da4 (après 11..cxd4)
12..dxc3 13.Cxc3 Db6! -+
Très belle victoire de Cherbourg ici.
Il nous faudra compter sur une nouvelle victoire d’Adeline pour réduire le score. Un pion de plus et un certain temps seront nécessaires pour venir à bout de la résistance de la 2ème féminine de l’équipe..
Autour, heureusement, des choses se passent. Sucé sur Erdre joue toujours à 7 et est opposé à Tours, une équipe qui abordait le week-end avec un seul pt d’avance sur le 1er relégable. Tours, hier, a gagné 6-1 contre Yffiniac et, mais est-ce une surprise, est en posture de gagner le match contre les joueurs de la banlieue Nantaise. Et Tours gagne contre Sucé-sur-Erdre! Un coup d’oeil nous montre que du côté de Malakoff et Quimper on perd, respectivement contre Brest et le Club 608. Tout cela nous replace 2ème.
Un groupe homogène, mis à part les extrèmes, où ça s’est bien bagarré. Le Vésinet reste le vassal du 1er, Lisieux, à l’issue de ce week-end tourmenté.